mardi 25 juillet 2017

Première étape viticole, les bourgognes de Mâcon à Dijon

Enfin dans le vif du sujet !

Du 17 au 23 juillet 2017

Après tous ces préparatifs et préliminaires, nous voici rendus en Bourgogne, terre vigneronne par excellence. 

Y arriver n'a pas été sans mal. Après une descente sans encombres du plateau ardéchois vers la vallée du Rhône (que nous avions déjà "cyclo-dégustée" l'été dernier), nous voici sur une piste cyclable, roulant vers la gare la plus proche afin de nous "trainsporter" jusqu'à Mâcon. 
Soudain, une voiture nous fonce dessus, effectuant un demi-tour entre platanes peu académique. Dans la panique, le jeune conducteur se trompe et accélère au lieu de freiner. Il emboutit Bastien qui, propulsé contre Blandine, éjecte celle-ci 2 mètres plus bas dans le fossé. Grosse frayeur, plus de peur que de mal heureusement. Un genou écorché pour Blandine, un guidon tordu, et plus gênant, la fixation de sa sacoche avant foutue. Bastien n'a pas de casse, le sac à dos ayant amorti le choc... Que faire ? Envoyer ce jeune conducteur au tribunal en appelant la gendarmerie (il nous avoue ne pas avoir d'assurance !) ? Encore sous le choc nous préférons opter pour un arrangement à l'amiable. Puis nous repartons découragés, dégoutés, tourneboulés, vers la gare. Nous passons 24h à Lyon pour pouvoir réparer, ce qui nous permet d'aller voir de la famille, excellente consolation. Merci pour leur accueil tant chaleureux qu'improvisé.

Fin de la parenthèse, et arrivée à Mâcon le 18 juillet en milieu de journée. 

Le méconnu Mâconnais

18 juillet - 28 km,
N'y connaissant rien aux vins de Bourgogne, il nous faut dégrossir le travail en commençant par une dégustation. Nous tombons par hasard sur la cave coopérative de Charnay-les-Mâcon, regroupant 150 ha en mâconnais et nord-beaujolais (les deux appellations se touchent). Les explications que nous y trouvons complètent la doc de l'office du tourisme. Les vins en Bourgogne sud sont classés entre différentes appellations par ordre hiérarchique en termes de qualité (exigence du cahier des charges) :
  • L'AOP générique Bourgogne, qui n'est en fait pas beaucoup utilisée par les viticulteurs indépendants dans le Mâconnais. Elle a elle-même des déclinaisons possibles (Bourgogne Aligoté, etc.)
  • L'appellation "régionale" Mâcon.
  • L'appellation "Mâcon-Villages" ou "Mâcon + nom d'un village" si les raisins sont tous récoltés dans le même village (exemple Mâcon-Solutré, Mâcon-Charnay, etc.).
  • L'appellation communale, pour les vignes situées sur certains terroirs reconnus (exemple Saint Véran, Pouilly-Fuissé, Viré-Clissé, Pouilly-Vinzelles, etc.)
  • Pas de 1er Cru ni de Grand Cru, merci bien, pas de ça chez nous !

Le cépage utilisé presque exclusivement pour les blancs est le chardonnay, ainsi appelé car il aimerait les sols à chardons. Globalement, les sols sont calcaires avec une terre brune parfois tendant sur l'orange. Pour le vin rouge, c'est principalement du gamay comme dans le beaujolais. Le fief du Pinot noir ne commence qu'un peut plus au nord...

A retenir de cette première dégustation (sur des 2015) :
  • Mâcon Blanc : fleuri, léger, gras et rond mais avec une légère amertume par derrière.
  • Saint-Véran (blanc) : plus vif, moins fleuri mais moins d'amertume.
  • Pouilly-Fuissé : gras et beurré, légèrement boisé.
  • Mâcon Rouge : épicé et fruité, mais peu tannique et discret. 
N'ayant bu que 5 verres de dégustation, nous ne parcourons au total que 28 km ce jour là ! Nous découvrons la voie verte (piste cyclable de Saône et Loire), et traversons déjà de beaux villages bourguignons. Nous faisons notre première nuit en camping sauvage, dérangés par une fête tardive dans une maison à proximité de notre coin d'herbe.


19 juillet - 41 km,
Le lendemain, petit-dej' dans les vignes avec vue sur la Roche de Solutré, fierté des locaux pour son terroir et aussi parce que Mitterrand en personne venait y promener. Nous ne montons pas jusque là-haut car ça monte sévère et nous manquons de sommeil...
Certains coteaux sont très raides. Mais ça ne fait pas peur aux tracteurs enjambeurs ! Au fond la Roche de Solutré.


Les vignes sont très étroites en général en Bourgogne, plantées à 1,20 m de large. Il faut des tracteurs enjambeurs.


Nous faisons une petite boucle autour de Mâcon pour visiter les villages renommés. Les coteaux sont beaux mais pas de tout repos à vélo. Nous traversons le hameau de Pouilly, bien léché, et montons à Fuissé. La maison Joseph Burrier- château de Beauregard, domaine de 42 hectares de vignoble y tient une "oenothèque" avec une gamme de vin assez diversifiée. Nous mettons l'employée au courant de notre démarche. Il faut bien expliquer qu'un oenocyclotouriste n'est pas un bon client. Mais nous sommes de futurs vignerons, et elle est aussi fille de viticulteur. Elle nous offre gentiment une bonne séance de dégustation sur la gamme locale en 2015 : Mâcon-Solutré, Saint-Véran, Pouilly-Fuissé. Nous trouvons le dernier un peu trop marqué par le bois. Il faut dire que ces blancs sont élevés voire vinifiés en fût, et qu'ils sont faits pour vieillir, le bois s'estompant avec l'âge. Notre hôtesse nous fait goûter un Pouilly-Fuissé un peu plus vieux (2012) nous expliquant que ces vins prennent parfois avec l'âge des notes grillées. Nous les trouvons et les apprécions beaucoup ! Très intéressant. 







La prise de notes s'impose !

L'église et les vignes de Fuissé

Fuissé vu de haut... (Obligés de remonter pour aller à l'étape suivante !)
L'après-midi, nous rencontrons à Chaintré un viticulteur bio au domaine Mathias. Nous sommes contents d'en trouver un par hasard, car ici les domaines affichent peu leur orientation en bio sur les panneaux. Nous recevons un accueil chaleureux. Gilles Mathias comprend bien notre démarche et partage avec plaisir son expérience. Il nous fait visiter le chai, nous raconte sa conversion et nous donne des conseils pour notre projet. Un beau moment d'échange très encourageant. 
Il nous met en garde sur le travail du sol lors du passage en bio car casser trop de racines superficielles affecte le rendement les premières années : "il ne faut pas oublier de faire du vin" nous dit-il plusieurs fois. Il nous offre un verre d'un excellent Pouilly-Fuissé plein de gras et pas trop boisé. Merci Gilles Mathias !


Gilles Mathias, à l'entrée de son caveau au moment de se séparer

Les contacts des deux vignerons suivants nous ont été donnés par Philippe Doherty, ancien professeur aux beaux-arts à Paris et grand amateur de vin qui vit désormais en Dordogne. 

Nous rencontrons les Bret Brothers le même jour, à Vinzelles au domaine de la Soufrandière. Les frères Bret ont réalisé leur rêve d'enfants en devenant vignerons. Ils ont repris le domaine de leur grand père coopérateur avec 4 ha de Chardonnay en appellations Pouilly-Vinzelles et Mâcon-Vinzelles, et ont donc créé l'activité vinification à la Soufrandière. N'ayant pas la possibilité d'acquérir plus de surface, ils achètent de la vendange à divers domaines qu'ils ont accompagné vers la conversion en Bio.
Rien n'est laissé au hasard chez les Bret Brothers : les vignes et les chais sont impeccables, fonctionnels, tout est fait pour que l'élevage des vins soit réalisé dans les meilleures conditions (vigilance sur toute pollution extérieure, respect du calendrier lunaire ...). Nous retenons de cette rencontre que la rigueur et la détermination sont des qualités pour réussir.

 Jean-Guillaume nous explique comment il gère l'enherbement en travaillant aux disques butteurs et aux lames bineuses en perturbant le moins possible les racines de la vigne.

Un grand merci à Jean-Guillaume d'avoir pris autant à cœur de partager son métier et de nous avoir offert cette fabuleuse bouteille de Pouilly-Vinzelles 2015 issue des vignes que nous avons visitées. (Elle a été dégustée le soir même au camping, bien fraîche grâce au ruisseau à 12°C qui sort des grottes d'Azé.)





Forts de cette journée bien remplie, nous pédalons jusqu'à Azé où nous trouvons beaucoup de confort : Calme, douche, toilettes, Internet et frigo artisanal !

20 juillet - 18 km,
Matinée connectée au wifi du camping, nous partons à 15h pour rejoindre Cruzilles. Nous arrivons au Domaine Guillot-Broux à 16h30 après avoir baptisé nos vêtements de pluie.
Nous ne repartirons qu'à 20h enivrés autant par les paroles d'Emmanuel Guillot-Broux que par la dégustation de sa gamme complète en Mâcon et Mâcon-village blancs et rouges.

Oui, on a tout goûté ! Et c'était tellement délicieux qu'on n'a pas trop craché ...
 Tout en nous racontant son histoire et ses choix, Emmanuel nous donne des conseils précis et pertinents pour notre projet. Il attache une importance particulière à la rigueur des prix pratiqués par le vigneron et à l'émotion que doit transmettre un vin et son histoire quelque soit son appellation. "Manu Guillot" est notamment le héro et co-auteur de la BD "Un grand Bourgogne oublié" que l'on a hâte de lire.


La visite du chai est également instructive et gouleyante puisque nous y dégustons aussi 2 cuvées 2016 prêtes à être embouteillées.


Nous découvrons avec autant de surprise que d'intérêt gustatif le pinot noir et la vinification en grappes entières.
Merci Manu et à bientôt pour les vendanges !

Bilan du Mâconnais : 2 cépages rouge (Pinot noir et Gamay) + 1 cépage blanc (Chardonnay) - Notion de climats = combinaison parcelle-terroir-exposition.
- Vinification en fûts (ou "pièces bourguignonnes")
--> De très très nombreuses cuvées dues aux multiples appellations + multiples climats
--> Des vignerons très accueillants et disponibles pour discuter avec nous

Dans la soirée, nous pédalons avec des ailes aux pieds, bien remontés par cette visite et la dégustation. Nous franchissons le col de Brancion comme qui rigole et redescendons jusqu'à Nogent, sur un versant beaucoup plus agricole. Nous faisons du camping sauvage dans les pâturages.

On a beaucoup aimé les paysages vallonnés du maconnais

Lumière du soir entre Mâcon et Chalons... Une plaine sans vignes sépare les 2 vignobles

La tente, un peu large, rentre tout juste dans ce sentier à vaches

21 juillet - 59 km,
Ce vendredi, nous pédalons un peu plus. Après des ablutions matinales au lac de Laive, nous traversons la forêt de la Ferté pour rejoindre la côte chalonnaise à Buxy. Puis nous continuons la route des coteaux vers le nord. Nous avons rendez-vous avec un jeune vigneron à Rully, non loin de Mercurey. Le domaine Lefort nous a été recommandé par Jean-Guillaume Bret et Emmanuel Guillot-Broux. David Lefort est installé depuis 7 ans et a suivi le parcours du combattant des aides aux Jeunes Agriculteurs, de l'accès au foncier, des prévisionnels imprévisibles... 

Il exploite aujourd'hui 5 ha qu'il travaille parfois à cheval quand il a les moyens de s'offrir un prestataire. Ses vins sont peu sulfités et vendus par certains caviste dans la catégorie des vins Nature. Cette catégorie ne possède pas de cahier des charges strict. Le principe est de vinifier avec des levures indigènes, et de limiter la dose de soufre bien en-dessous des seuils autorisés en bio. (A différencier des vins "zéro sulfites" qui peuvent être vinifiés avec des levures du commerce).
Le chai à cuves de David Lefort est petit, mais le caveau à barriques en sous-sol est spacieux et magnifique. 
Tout comme Emmanuel Guillot, David ne débourbe pas ses blancs et les vinifie en fûts. Il encuve également tout ou partie de son rouge en grappes entières (avec rafles). 

David a fait l'exploit de partir de zéro, sans être issu du milieu. Il commence à exporter ses bouteilles, et a créé lui aussi une société pour acheter du raisin à des collègues et produire un peu plus de bouteilles.


David Lefort est aussi fabricant de meubles en lattes de barrique (OAK design)


Nous quittons David un peu tard et trouvons avant la nuit un bivouac le long du canal du Centre.


22 juillet - 53 km, Total 305 km de vélo depuis Monbazillac
Réveil matinal au bord du canal
  Ce samedi est consacré à la visite des côtes de Beaune et Côtes de Nuit. Nous arrivons dans la zone des grands crus, et il n'est pas aisé de rencontrer des professionnels. Dans un caveau municipal, devant lequel sont garées porches et ferraris, on nous demande "si on vient pour acheter" avant de nous proposer une dégustation à 15 euros. Nous entrons dans la Bourgogne sur-cotée, où le vin des hommes est aussi cher que leur temps. Nous nous contenterons de traverser ses villages et terroirs à vélo, en faisant faire un break à nos papilles pourtant aux aguets. 

Une journée pleine de dénivelés le long des parcelles ceintes de murs en pierres. Ce sont les fameux "clos" correspondant à un climat bien délimité.


L'itinéraire conseillé aux vélos ne ménage pas leurs conducteurs. Dans les villages aux noms prestigieux, chaque maison est un caveau de vigneron. 


Voilà à quoi ressemble notre attelage en journée
Les vignes couvrent les coteaux escarpés, mais ont également envahit la plaine, créant une mer de vigne.



 Le ciel est gris, la mer est verte, laisse un peu la fenêtre ouverte. 

Les fameux Clos bourguignons sont des "Climats" délimités par des murets en pierres

Après avoir traversé les noms mythiques de Chassagne-Montrachet, Meursault, Volnay et Pommard, nous arrivons à Beaune pour midi. 
A Beaune, nous apercevons le toit vernissé des hospices et nous léchons les vitrines de la fameuse librairie Athanaeum de la vigne et du vin.

L'après-midi ce sera encore Aloxe-Corton, puis nous montons sur le plateau dans les Hautes Côtes de Nuits où nous avons le plaisir de découvrir des vignes larges et enherbées, un peu comme dans notre bergeracois. Comme quoi tout n'est pas serré et rikiki en Bourgogne ! 

Nous retrouvons notre ami Pierre-Yves à Nuit-St-Georges

Tout notre barda rentre dans son break avec les vélos !

Avant de rentrer chez lui à Dijon, retrouvailles au Bist'Roch, bar à vin de Nuits-St-Georges
 

Voilà pour la Bourgogne de Mâcon à Dijon ! Merci à Pierre-Yves pour son accueil ses derniers jours. Nous voilà prêts à repartir pour l'Auxerrois et le Sancerre.

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